Les contentieux en matière de modèles communautaires peuvent reconnaître des monopoles étonnants comme dans l’arrêt du 28 septembre 2017 du Tribunal de l’Union rendu sur recours contre une décision de l’Office, décision rendue à propos des lampes en forme d’étoile. L’arrêt est là.
Avril 2014 : publication de l’enregistrement du modèle communautaire pour des lampes:
17 juillet 2014 : demande en nullité en invoquant le modèle communautaire enregistré sous le numéro 1754342-0001 et publié le 11 octobre 2010 destiné à être appliqué aux « lampes » :
La procédure
2 mars 2015 : la division d’annulation de l’EUIPO annule le modèle
4 mai 2015 : recours
8 juillet 2016 : la Chambre de recours de l’EUIPO rejette le recours.
28 septembre 2017 : le Tribunal de l’union européenne rend sa décision sur le recours du titulaire du modèle frappé d’annulation.
La description des modèles en cause
…… l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit était déterminée par les caractéristiques communes suivantes :
– la lampe était constituée d’un boîtier ;
– le boîtier était d’une couleur claire ;
– le boîtier présentait une forme d’étoile avec cinq branches ;
– le boîtier reposait sur ses deux branches inférieures ;
– il y avait à l’intérieur du boîtier un cercle plus clair que les branches de l’étoile, lesquelles étaient un peu plus sombres.
Le débat sur certaines caractéristiques
33 S’agissant d’une sixième caractéristique, la chambre de recours a considéré que dans le dessin ou modèle antérieur toutes les branches de l’étoile étaient de même largeur, tandis que dans le dessin ou modèle contesté la branche supérieure de l’étoile était inclinée vers le haut et formait un triangle.
34 Cette conclusion est contestée par le requérant qui soutient que le dessin ou modèle contesté diffère du dessin ou modèle antérieur par trois caractéristiques et non pas une comme l’avait considéré la chambre de recours. Ainsi, il relève que la branche supérieure de l’étoile a une « forme pyramidale », que la surface latérale des branches inférieures de l’étoile a une forme trapézoïdale et que la partie frontale du boîtier présente une courbe sphérique.
35 Il convient de relever d’emblée que les deux premières prétendues différences que le requérant établit entre les dessins ou modèles en conflit sont une déclinaison de l’unique différence relevée par la chambre de recours aux points 21 et 24 de la décision attaquée, à savoir la différence de largeur des branches supérieures et inférieure de l’étoile.
36 À cet égard, la chambre de recours a bien relevé, en substance, que, dans le dessin ou modèle contesté, vu de profil, la branche supérieure de l’étoile était inclinée vers le haut et formait un triangle. Le fait que la chambre de recours n’a pas estimé que les quatre faces de la branche supérieure de l’étoile étaient de forme pyramidale est sans pertinence en l’espèce, car elle a relevé à bon droit le rétrécissement de la branche supérieure de l’étoile.
37 Quant aux caractéristiques relatives aux branches inférieures, dont la surface latérale serait de forme trapézoïdale, et à la partie frontale du boîtier, qui présenterait une courbe sphérique, il convient de relever que des telles caractéristiques ne ressortent pas des vues du dessin ou modèle contesté produites lors de l’enregistrement de celui-ci, telles que reproduites au point 2 du présent arrêt. Ainsi que le fait valoir l’EUIPO, le requérant n’a pas produit de vue de profil du dessin ou modèle contesté permettant de constater ces caractéristiques.
38 C’est donc sans commettre d’erreur que la chambre de recours a identifié les caractéristiques des dessins ou modèles en conflit.
Le modèle antérieur sur la forme en étoile de la lampe conduit à l’annulation du modèle second en date
47 Il convient de relever que, en constatant que l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit était dominée par la forme en étoile, la chambre de recours n’a pas considéré que les autres caractéristiques que le requérant qualifie de « configuration » seraient négligeables. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que la question de savoir si la forme en étoile pour les lampes est nouvelle ou fréquente est sans incidence sur l’appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté, au sens de l’article 6 du règlement n° 6/2002. En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 17 ci-dessus, le caractère individuel d’un dessin ou un modèle résulte d’une impression globale différente ou d’absence de « déjà vu » par rapport à toute antériorité au sein du patrimoine des dessins ou modèles.
48 Certes, lors de l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle par rapport à toute antériorité au sein du patrimoine des dessins ou modèles, il convient de tenir compte de la nature du produit auquel le dessin ou modèle s’applique ou dans lequel celui-ci est incorporé et, notamment, du secteur industriel dont il relève (voir considérant 14 du règlement n° 6/2002), du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle, d’une éventuelle saturation de l’état de l’art, laquelle peut être de nature à rendre l’utilisateur averti plus sensible aux différences entre les dessins ou modèles comparés, ainsi que de la manière dont le produit en cause est utilisé, en particulier en fonction des manipulations qu’il subit normalement à cette occasion (voir arrêt du 7 novembre 2013, Félin Bondissant, T‑666/11, non publié, EU:T:2013:584, point 31 et jurisprudence citée).
49 Toutefois, en l’espèce, ainsi que cela a été considéré au point 25 ci-dessus, le créateur n’est soumis à aucune limitation en ce qui concerne la conception du boîtier.
50 De même, il ne saurait être utilement soutenu que l’état de l’art en ce qui concerne les lampes soit saturé et que la forme en étoile du boîtier des lampes soit banalisée à tel point que, comme le fait valoir en substance le requérant, l’utilisateur porterait une plus grande attention à la forme affinée de la branche supérieure de l’étoile constituant le dessin ou modèle contesté qu’aux autres caractéristiques des dessins ou modèles en conflit.
51 En tout état de cause, ainsi que cela a été relevé aux points 32 et 41 ci-dessus, les dessins ou modèles en conflit ne coïncident pas uniquement par leur forme en étoile, mais également par quatre autres caractéristiques importantes.
52 Deuxièmement, l’argument du requérant selon lequel le fait que le centre du boîtier est plus clair que ses branches est de moindre importance étant donné que cette caractéristique est de nature exclusivement technique ne saurait prospérer. Même à supposer que cette caractéristique soit de nature exclusivement technique et que, de ce fait, il faudrait lui accorder une moindre importance lors de l’appréciation de l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit, il convient de relever que, en l’espèce, les dessins ou modèles coïncident également par d’autres caractéristiques qui ne sont pas induites par des contraintes exclusivement techniques.
53 Troisièmement, il convient de relever que l’argument du requérant selon lequel l’utilisateur averti serait habitué aux lampes ayant une forme en étoile et que, dès lors, il doit être accordé moins d’importance aux cinq caractéristiques communes des dessins ou modèles en conflit résulte d’un emploi erroné en l’espèce de l’expression « utilisateur averti ». En effet, ainsi que cela est rappelé au point 19 ci-dessus, l’utilisateur averti, même s’il connaît différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, n’est pas un concepteur ou un expert technique. Or, l’argument du requérant sous-entend que l’utilisateur averti, en l’espèce, dispose de connaissances très approfondies en ce qui concerne l’état de l’art s’agissant des lampes.
54 Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le présent moyen ainsi que le recours dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur le deuxième chef de conclusions.