Impact de la situation de la demande de base de la marque internationale qui a permis d’obtenir la saisie-contrefaçon en France.
G a obtenu deux ordonnances pour pratiquer des saisies-contrefaçon sur la base d’une marque internationale visant la France enregistrée contre B…….. accusée de la contrefaire.
La décision du 20 décembre n’examine qu’une seule de ces deux ordonnances.
Dans cette décision, B ……. demande la rétractation de cette ordonnance, arguant que G………. a omis des informations cruciales concernant le refus d’enregistrement de sa marque de base en Turquie et l’existence d’une demande de marque en France par B……….. postérieure à la date à la date d’enregistrement de la marque invoquée par B…..
Les principes rappelés à la motivation de la décision du 20 décembre 2024
- En application de l’article 3, paragraphe 4, et de l’article 4, paragraphe 1, du Protocole relatif à l’arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international de marques (le Protocole de Madrid), une demande internationale, formée par l’intermédiaire d’un office local auprès duquel une demande locale, dite demande de base, avait été faite est enregistrée immédiatement par le bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, à compter de la date à laquelle la demande internationale a été faite auprès de l’office d’origine, et produit dans les territoires désignés par cette demande les effets d’une marque enregistrée à compter de cette même date. Ce n’est qu’a posteriori que l’office du territoire concerné par l’extension de la protection peut notifier au bureau international un refus d’enregistrement.
- Ainsi, l’enregistrement en France d’une marque issue d’une demande internationale est immédiat et précède tout examen, de sorte que, par exemple, contrairement au cas d’une demande nationale, le délai d’opposition contre une marque issue d’une demande internationale étendue à la France court après l’enregistrement.
- En revanche, en application de l’article 6, paragraphe 3, du Protocole de Madrid, la protection résultant de l’enregistrement international ne pourra plus être invoquée si, avant l’expiration de cinq ans à compter de la date de l’enregistrement international, la demande de base fait l’objet, notamment, d’une décision finale de rejet, de révocation, de radiation ou d’invalidation. Le paragraphe 4 du même article précise que l’office d’origine notifie les décisions pertinentes au bureau international qui en informe les États ou organisations intéressés ; il s’agit d’une disposition de publicité sans incidence sur l’effet immédiat de la disparition de la marque de base.
- Il ressort de ces dispositions que la situation juridique de la demande de base d’un enregistrement international désignant la France, dans les 5 années suivant l’enregistrement international, est particulièrement importante pour apprécier les effets en France de cet enregistrement, et ce d’autant plus qu’aucun contrôle n’a été effectué a priori en France avant cet enregistrement.
Application au cas d’espèce
- Il en va en particulier ainsi, en l’espèce, où la demande de base, enregistrée il y a moins de 5 ans, a fait l’objet de deux décisions différentes de refus d’enregistrement suite à des oppositions, qui ont été confirmées par un organe de recours interne à l’office puis à nouveau par un tribunal. De telles circonstances affectent fortement l’appréciation des chances de succès d’une action en contrefaçon fondée sur cette marque et, partant, celle de la proportionnalité des mesures susceptibles d’être autorisées sur le fondement de cette marque à l’égard d’un tiers.
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- Dès lors, en dissimulant cette information, qu’elle ne pouvait pas ignorer, étant déposante de la demande de base en Turquie, la société G……n’a pas présenté, au soutien de sa requête, l’ensemble des faits objectifs de nature à permettre au juge d’appréhender complètement les enjeux du procès en vue duquel était demandée une saisie- contrefaçon. Elle a ainsi manqué de loyauté à l’occasion de la présentation sa requête et privé le juge d’exercer pleinement son pouvoir d’appréciation des circonstances de la cause afin d’autoriser une mesure proportionnée.
Ainsi, l’Ordonnance de rétractation retient que G….. a manqué de loyauté en ne révélant pas les refus d’enregistrement de sa marque de base en Turquie, ce qui aurait pu influencer la décision du juge qui a accordé l’ordonnance de saisie-contrefaçon contestée.
L’ordonnance autorisant la saisie-contrefaçon est rétractée, et le procès-verbal de saisie-contrefaçon annulé…sans examiner le second argument invoqué par B…….